Au premier regard, avant même de démarrer l'entretien avec Claire Chazal, François Hollande a la tête qui penche à droite. La vigilance est de mise. Elle sera de courte durée, montrant un homme, habituellement mécanique dans sa gestuelle et hâché dans son rythme vocal, d'une grande fluidité verbale et très animé de l'intérieur. Ses gestes sont plus élevés que d'ordinaire, se situant au niveau de la poitrine, ils renseignent sur l'importance que l'on accorde à son propre propos, le degré d'association à son discours. Les deux mains sont participatives, la main qui argumente, explique, décrit (la droite) et la main de la spontanéité (la gauche) jouent régulièrement jeu égal, tandis que le candidat Hollande ne nous donnait à voir que la main droite toujours contrôlant le discours. L'oeil et le sourcil droit hypertoniques, à maintes reprises, montrent la volonté de Hollande de convaincre les Français.
Forte conscience des enjeux
"Le cap que doit fixer le président de la république" provoque un frémissement de l'oeil gauche qui manifeste un stress émotionnel. Hollande ne cherche pas ainsi à s'auto-convaincre, ce signe montre qu'il ne se cache pas in petto les difficultés à venir et les risques inhérents à un échec possible.
La fibre sociale de Hollande ressort lorsqu'il évoque la protection des salariés et le soutien aux entreprises. L'emploi, la bataille du chômage, comme les salariés sont placés systématiquement dans la zone intime, à gauche de lui. Préoccupation encore plus grande que la dette dans la tête présidentielle. Mais la perspective du "dialogue social" évoqué fait peur au président, les yeux s'écarquillent. L'oeil gauche amorce une fermeture peu de temps après, soulignant le stress à voir les partenaires sociaux négocier sur les plans sociaux.
Evoquant "l'agenda du redressement", le poing se ferme, la langue sort, le débit vocal s'accélère, toute l'énergie présidentielle est donc focalisée sur cet enjeu majeur qui n'exclue pas un certain nombre de difficultés à lever. On retrouve les mêmes poings fermés sur la jeunesse, les deux cette fois-ci, dirigés vers Claire Chazal, à mi-hauteur du tronc. La volonté est déterminée mais est assortie d'un léger stress de performance.
La crainte de l'échec
Alors que le président doit répondre sur la polémique récente née de la volonté du patron de LVMH Bernard Arnault de demander la nationalité belge, ses clignements d'yeux diminuent fortement, le corps se raidit et part en arrière, la tête se relève, mettant à distance l'interlocutrice et celui qui devrait faire preuve de davantage de "patriotisme" (sic).
L'épine des Roms vient également titiller François Hollande dont la main droite reprend le contrôle, laissant celle de la spontanéité, la gauche, collée sur la table, l'analyse lexicale montre également un effet de distanciation, les Roms sont évoqués par "ces populations" notamment.
Régaissant à la question du "style", la voix devient fluette, le rythme retrouve son hâché de la campagne présidentielle, on passe à deux doigts du savonnage ; et les yeux manifestent du stress en fin d'interview avec maints clignements en grappes, ceux-là mêmes nous révélaient le stress de Hollande, lors du débat avec Nicolas Sarkozy, à vouloir rechercher dans sa mémoire l'anaphore qui devait lui assurer une part de succès.
Dans l'ensemble, Hollande surprend par un dynamisme gestuel et une expressivité du visage qu'on lui connaissait peu. L'énergie à vouloir agir est patente et sincère, mais si le président et son gouvernement semblent prêts à mouiller la chemise, c'est aussi la sensation de marcher sur des oeufs et d'être attendu au tournant qui transpirent.